Verticale de la Côte Rotie "Rose Pourpre" de Pierre Gaillard
CR de la soirée dégustation du 28/10/2009 au Vin Passion, où les habituels joyeux drilles à l'humour imparable de lièvre se sont retrouvés pour une petite et partielle verticale de la Côte Rôtie "Rose Pourpre" de Pierre Gaillard.
A propos de la Rose Pourpre
Les vins proviennent de la parcelle dite de Côte Rozier orientée plein sud sur la Côte Brune, caractérisée par une chaleur plus importante liée à ses murs de pierre sèche.
Les sols sont riches en schistes et en oxyde de fer qui confère aux vins un caractère plus tendu que sur la Côte Blonde.
Les grappes font l'objet d'un éraflage à 100% et sont ensuite triées. Après la fermentation conventionnelle, les mouts font l'objet d'une macération post fermentaire à chaud (30°C). Tout cela, en plus de pigeages répétés (3x/jour) signe une extraction maximale.
Après un élevage de 18 mois en barriques neuves, les vins font l'objet d'une dernière sélection qui donnera la cuvée rose Pourpre.
Selon Pierre Gaillard, les vins sont à leur apogée après 10 ans et à leur sommet jusqu'à 15 à 20 ans.
La dégustation
Les millésimes dégustés sont les suivants (servis dans l'ordre) : 1994, 1995, 1996, 1997, 1998, 1999, 2004 et 2005. Il ont fait l'objet d'un carafage d'une heure à +- 16°C.
1994
La robe est grenat, assez profond avec une évolution marquée. Le nez est assez intense avec une présence de chaleur un peu forte. On perçoit tout de même de la réglisse, des fruits noirs compotés et des nuances empyreumatiques de toasté.
L'équilibre en bouche est assez déplacé vers l'acidité, le corps un peu maigre et marqué par l'alcool. La finale est moyenne et on y retrouve un peu de fruit et des épices poivrés. Les tanins sont très souples, entièrement fondus. Bien, sans plus.
1995
Le vin se présente avec une robe nettement moins tuilée que le précédent, toujours grenat et le nez est nettement plus intense et complexe. On y retrouve des épices, des notes animales sanguines, des fruits noirs toastés, de la réglisse et un côté chocolat /café.
La bouche est splendide et est emmenée sans être dominée par l'acidité qui rafraichit les fruits rouges acidulés dès l'attaque et sur une longue finale, avec un relief tannique plus évident mais cela reste très fondu. Remarquable
1996
Retour vers une robe plus évoluée. Le nez est plus fermé, plus marqué sur l'animal, avec quelquefois certains manques de netteté et on retrouve pas mal d'alcool comme pour le 94. Même chose pour la bouche où l'acidité est un poil aigrelette, le corps d vin un peu maigre et je suis frappé par quelques notes terreuses indélicates. Moyen, mais peut-être une mauvaise bouteille.
1997
La robe est grenat sans notes évolutives. le nez est à nouveau assez fermé, réduit, un peu poussiéreux mais à l'ouverture on perçoit des notes de fruits rouges, de violette, de bonbon et quelques pointes animales fugaces. C'est nettement plus complexe que le 96.
L'attaque en bouche est marquée par une acidité rafraichissante qui récupère un peu le fruit pas excessivement concentré et atténue les notes d'alcool. Les tanins sont totalement intégrés, d'une incroyable souplesse. Si cela avait été plus long, cela aurait été très bien. Donc, Bien.
1998
Grosse première vague de fourire généralisé... Dur de reprendre sa concentration. Et pourtant, le vin en vaut nettement plus la peine.
La robe est plus jeune d'un beau grenat profond. Le nez est plus puissant, complexe avec des notes animales, des fruits rouge, noirs aussi, un côté sanguin marqué mais une beaucoup moins grande impression d'évolution que les vins précédents.
La bouche est fraiche, fruitée, ronde, suave, équilibrée, avec de beaux tanins, très fins et une agréable note d'épices sur la finale qui en fait un beau vin de gastronomie. Très, Très Bien.
1999
On retrouve la même robe que pour le 98, et le nez est au diapason avec un bouquet de fruits rouges et noirs, des notes sanguines, empyreumatiques et, pour la première fois, la présence d'un peu de boisé.
La bouche est très belle, tout en équilibre, concentrée de fruits noirs, avec de beaux épices et des tanins "poudrés" comme dit m'on voisin. La longueur est comme le reste, parfaite. Excellent et plus, et coup de cœur.
2004
Le groupe se défonce toujours autant... faudra qu'on analyse les adjuvants :-)
Donc après avoir séché les larmes (de mon visage, pas du vin), je mire cette robe extrêmement dense. Le nez est lui résolument fermé. Encore une bête blague qui passe... le temps de laisser à la chose le temps d'un peu s'ouvrir. Fruits noirs, cassis et vanille frappent à la porte, bien fait d'attendre... C'est pas mal du tout. La bouche est plus directement plaisante avec de l'acidité, du fruit, des tanins fermes et beaucoup de fraicheur et de densité en finale. mon voisin aime moins, mais la dernière vague de blagues d'en face . Très bien et à laisser un peu en cave ou à servir sur un beau râble.
2005
Vous imaginez pas l'ambiance, les seaux sont pourtant lourds du vin recraché. Ca doit-être dans l'air, la torpeur de ce second été indien. Bref...
La robe est plus rubis que grenat, très dense et pleine de jeunesse. le nez est à nouveau assez fermé et peine plus à s'ouvrir (nous pas). On retrouve du fruit noir, des framboises, de la vanille et quelques notes empyreumatiques de cacao. L'acidité est étonnamment faible, le milieu de bouche fort sur les fruits noirs et le café, mais il est surtout marqué, ainsi qu'en finale par des tanins trop rugueux, a ce stade, du moins. Bien à Très Bien
Conclusions
Les millésimes les plus anciens (jusque 97) sont souvent marqués par une assez faible corpulence, marqués par l'acidité mais, un peu, sauf le 95, en manque de fruit. Le finales ne sont pas kilométriques. A partir de 98, le style change radicalement. Si l'acidité est toujours bien présente, le fruit est nettement plus marqué, les nez sont plus complexes et les bouches plus amples. On retrouve plus aisément les arômes annoncés , ferreux, sanguins et épicés.
Les tanins sont toujours souples et remarquablement intégrés sauf dans les millésimes 2004 et 2005 où leur jeunesse se fait sentir.
Globalement, cette cuvée est assez élégante mais pas toujours précise, et, pour son prix (+- 60 euros), on aurait pu attendre plus d'ampleur sur les vieux millésimes. Dix années semblent être le temps idéal pour ouvrir cette cuvée.
Un énorme merci à John et Marie-Thérèse du Vin passion pour l'organisation et à l'équipe pour les habituelles blagues aussi lourdes qu'hilarantes.