Du pétrole et du riesling...
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Pour reparler un peu Alsace sur ce blog, je ne sais pas si Maître Chapoutier a cherché le buzz, il y a quelques jours avec sa sortie « le pétrole dans un riesling est un défaut » (oui, je sais, je suis elliptique sur le coup), mais certaines sorties ont le mérite de faire parler des gens sages (non, pas moi, jamais) et d’amener à une belle réflexion sur le sujet, car en fait, des impressions de pétrole, on en a tous eu d’un riesling à l’autre, et pas que chez Hugel ou Trimbach. Tout d’abord, tordre le coup à une idée préconçue : le pétrole n’est pas un arôme variétal du riesling, cela paraît très clair. On serait plutôt sur du floral et des agrumes, surtout les seconds dans les régions plus septentrionales, avec une note citrique qui est souvent dopée par la présence de sulfites ajoutés. Alors vous me direz : « mais dans ce cas, Trimbach et Hugel » ont bien raison de défendre la présence de terroir à travers cet arôme. Oui et non, on en reparlera plus loin…. Pourquoi ? Parce que d’abord, y en a quand même pas mal qui me diront « Mais si, mais si, moi du pétrole j’en ai goûté dans des rieslings jeunes, d’entrée de gamme où le lien avec le terroir, bof, bof »… et ils auront raison. Oui mais… il faut aussi revenir à la notion de terroir. Et là, je pense, comme d’autres, qu’en dehors du Buzz, l’ami Chapoutier n’a pas voulu s’en prendre à la planète « Riesling classique », je veux dire par là, à l’ancienne, plus représentée par des maisons comme Trimbach et Hugel que par Humbrecht, Ostertag ou Josmeyer, il est vrai. Mais là, on parle bien d’arômes secondaires qu’on retrouve quand même très souvent sur des vins issus de sols lourds de type marno-calcaire comme autour de Ribeauvillé, comme par exemple sur le Geisberg de Kientzler pour en citer au moins une fois un autre, et qu’on ne retrouve que très très rarement sur des sols légers granitiques. Serait-on donc là devant une preuve aromatique d’une quelconque minéralité, mot qui fait frémir tant d’internautes ? Ce qui est sûr, c’est que c’est quand même difficile de ranger la chose dans la famille des floraux. Et si…, comme souvent tout cela atteignait une complexité égale à celle des sols alsaciens, si tout n’était pas blanc ou noir ? Ce Week-end, je goûtais pour la énième de ènième fois le Riesling Grand Cru Kirchberg 1999 du domaine Louis Sipp. Dès l’ouverture, ce vin, fermé dans sa jeunesse, donne un nez puissant, ouvert, terriblement plaisant et complexe et dans la large palette aromatique proposée, il y a indéniablement des hydrocarbures. Ce vin n’a pourtant pas vraiment connu de vinif chaotique, Etienne Sipp favorisant, entre autres, des pressurages longs et doux….Le vin propose encore beaucoup de maturité surtout en bouche où une pointe de résiduel vient arrondir une tension très présente. Alors un point perdu par Monsieur Chapoutier… peut-être ! En fait rien n’est simple et il ne faut surtout rien conclure à mon avis. Des amateurs du pétrole, il y en a aussi légion, et les pauvres en seraient probablement fort déstabilisés de goûter autre chose dans leur rieslings gardés religieusement 10 ans en cave. Même chose, en restauration, où, ce classicisme hydrocarburé séduit encore beaucoup et où plus de variabilité aromatique, d’un millésime à l’autre, rend les choses plus compliquées. PS : Merci à Florian Hartweg et à Etienne Sipp pour leurs sages réflexions. |