VDVs 43 : Les élections pinardentielles
feat.
Fallait-il s’attendre à autre chose de la part du très joyeux trublion Vindicateur qu’est Antonin sinon nous mener dans les affres du jeu de la politique par le choix de sa thématique en tant que Président autosuggéré* des 43e Vendredis du Vin, ceux des élections pinardentielles ? Michou Bichou, l"Expert", il vous dira que non, bien sûr, j’en ai bien peur….
* with more than a little help of Iris
Fallait-il comme on a pu le lire s’inquiéter de voir, par cette thématique, se réveiller des tabous que la joyeuse communauté vinique tente de laisser bien sommeiller ? Que nenni ! Le but reste évidemment de faire résonner de nombreux plops ce dernier vendredi de février… et, en langage électoral, si tu t’abstiens, t’as toujours tort !
Votez dur ou votez mou
Mais... Votez dans le trou
Et si aux yeux de certains la thématique du jour ne restait pas de prime abord évidente, avec le délai d’un mois de réflexion qui nous a été donné par Antonin, on ne pouvait pas non plus crier au chemin de croix.
Ce qui était amusant, c’était de voir, au travers de notre petit groupe de Bruxellois, les « Terribles Vendredis du Vin Brusseleirs », comment cette thématique allait être interprétée au travers des bouteilles présentées.
Là, on peut dire qu’on en a eu pour tous les goûts, dans tous les genres, avec plus ou moins de pertinence ou plus ou moins d’humour et de décalage, il est vrai qu’ au pays de la Zwanze , affronter les choses trop sérieusement, ça, on sait pas faire, nous, hein…..
"Je crois que ce type est fou, non?"
"Maintenant que tu le dis...."
Pour tenter que la suite soit quand même un peu compréhensible et logique, les vins de cette session ne vous seront pas commentés dans l’ordre de service mais en fonction de leur appartenance à quatre catégories :
- La politique externe ou l’interaction du vigneron, dans son métier, face aux élus de la nation
- La politique interne ou le joyeux petit monde de Don Camillo que constituent les vignerons entre eux
- Les militants ou comment, en plus d’être vigneron, adhérer pleinement à une cause politique.
- Les inclassables…. Et quand on dit inclassables, faut s’attendre au meilleur… et au pire.
Oserais-je aussi écrire que, pour accompagner tout cela, il y avait à nouveau à manger pour un bataillon ?
Comme d’hab, aussi, les images sont de Bridget qui quand elle est prise à son propre jeu, nous donne vachement soif…
Bon, voyons l’affaire VDVs plus près :
1. La politique externe
Dans cette catégorie, il n’y a qu’un seul nominé, mais il est de taille, que l’on parle de son tour ou de sa gouaille : Seppi Landmann et sa Cuvée Erotique.
Selon le millésime, pour cette cuvée, Seppi Landmann produit depuis 96 (oui, l’inverse de 69) un Crémant en Magnum les années fraiches ou un Muscat les années plus généreuses. Même si on sait que l’oiseau est très loin d’être insensible aux charmes du beau sexe, à commencer par ceux de Sophie Marceau, il serait très elliptique de s’arrêter à l’étiquette frontale, le plus succulent de l’histoire se trouvant sur la contre-étiquette où le vigneron n’hésite pas, avec beaucoup d’humour, à vilipender les désastres de la loi Evin.
"Faîtes leur de bon vins, ils vous feront de bonnes lois"
C’est un vrai combat pour Seppi qui n’hésite jamais à jeter à la face des politiques (comme le jour de ses 60 ans aux élus présents) : « Depuis 96, le seul moyen de s’amuser en France, c’est se gratter sous les bras ! », sa manière de regretter qu’à force de voir les villages viticoles ceinturés par la gendarmerie locale lors des agapes annuelles, ces dernières soient condamnées à disparaître.
La Cuvée Erotique du jour est un Muscat d’Alsace 2009 qui a récolté une pratiquement unanimité des votes. Certes, on y retrouvait quelques notes chaleureuses du millésime, mais rien qu’au nez, le cocktail était très complexe, net, avec des notes florales et anisées qui s’écartent. Un peu moins riche en bouche quoiqu’avec un beau gras, le vin est frais et plaisant, ne pouvant perturber que par son amertume, pour ceux qui n’aiment pas trop cela. Du pur Seppi, en fait, rondement mené, entre plaisir et générosité.
2. La politique interne
Pour commencer ce que j’appelle le chapitre de la politique interne, il paraissait presque évident de boire un vin dont le géniteur a l’habitude de ne pas passer au second tour, ni même au premier, faute de récolter les signatures nécessaires à l’obtention du sésame « Appellation ». Le candidat se nomme Bruno Schueller, s’il est incompris de beaucoup (et s’en fiche pas mal, en fait), il a ses fidèles, dont le monomaniaque que je suis. On aurait pu choisir un de ses magnifiques et étonnants pinots noirs, mais le choix du jour s’est porté sur le Vin de Table R « Le Bild » quoi correspond à un Riesling Bildstoecklé 2004.
Très floral au nez, accompagné de notes sauvages, épicées, un poil cireuses et de quelques touches secondaires pétrolées. A ce stade, impossible d’imaginer pourquoi l’assentiment de l’assemblée des Pairs n’a pas donné son accord. D’autant qu’au second stade, celui de la bouche, on ne pige pas non plus, l’objet de l’opprobre s’avérant particulièrement équilibré, droit (presqu’encore tendu du string), fin, sec, très riesling en pleine maturité. Et comme la longueur est vraiment de la partie… on ne comprend pas, mais alors, pas du tout, le déni prononcé ! Serait-ce peut-être l’austérité minérale qui aurait choqué des bouches avides de sucrosité ? Non, on n’ose y penser….
Dans le même registre, deux militants déchainés ont proposé les quilles de leur candidat, pourtant un vrai Hurluberlu, celui-là… vous avez tous reconnu Sébastien David.
Dans le cas de ce dernier candidat, la quête à l’obtention du sésame « Appellation » n’a pas été vaine, mais le parcours fut parsemé d’embûches qui n’étaient pourtant pas des Chevaliers du Ni, un Chevalier Noir, un Sorcier sur son pont ou un lapin vorace. Nenni, sur la tour presque imprenable étaient retranché les autres élus de Saint-Nicolas de Bourgueil, trop heureux de mettre des bâtons dans les roues à celui qu’ils considèrent comme un agité du bocal, alors que lui ne fait qu’agiter ses barriques (Kezako) et, ne parle qu’à l’oreille des vins (Vin d’une Oreille). Tout y est passé, non sans humour, vu que selon le dégustateur, les cuvées se sont avérées trop acides un jour, pas assez acides le lendemain, et ainsi de suite, pour tout ce qui est jugeable sur un vin. Bref, seule la voie de la justice, et les frais qu’elle exige, purent éviter à l’ami Seb, la relégation en division inférieure, celle des Vins de Table…. Mais est-elle pour autant inférieure, au fait ? Comment, ce vigneron figure au Patrimoine du groupe Renaissance des Appellations ?
Vous imaginerez bien qu’au bureau bruxellois du parti de David, le combat contre les Goliaths de l’Appellation fut suivi avec passion !
Pour fêter la victoire du « Nain » (patronyme que lui accorde gentiment Marc Tempé) et l’échec des géants, deux cuvées du Seb étaient à l’honneur.
La première, le Saint-Nicolas de Bourgueil « L’Hurluberlu » 2010, normalement cataloguée au rayon « bombe de fruit », nécessite en ces saisons une aération nécessaire à l’assouplir, l’austérité perçue (encore elle) n’étant pas vraiment l’idéal partenaire de tanins encore un peu secs et sévères, alors que la chose était bien plus goûteuse quand il fera plus chaud.
A noter, et c’est bien dommage, qu’une fois de plus, il n’y a pas que les Hellènes qui durent subirent la glaciale austérité européenne, presque tous les rouges du jour montrant une dureté pas toujours agréables, nous forçant plus que de coutume mais pour la troisième fois cet hiver à préférer le blanc au rouge.
La deuxième cuvée se prêtait à ravir à la thématique du Président Antonin Montrenoutékouill en répondant au doux nom de « Ni Dieu, Ni Maître », le Saint-Nicolas de Bourgueil 2007 de la Série « Patrimoine SD » de Tonton David. Si cette cuvée nous a appris la patience (minimum 3 ans) pour connaître son épanouissement, elle ne nous a pas déçu, loin de là, et a terminé de loin en tête du tour final pour l’élection du meilleur rouge.
Avec un nez frais à donf, plein de fruits rouges et noirs pétant de santé et d’une petite rondeur lactée et une bouche gourmande, tendue, viandeuse et des tanins maîtrisés, ce côté toujours aussi pétant de fruit par-dessus, c’est l’Elysée d’un soir qui est ici atteint !
Pour clore le chapitre « Don Camillo, Pépone et les Appellations », il y avait Danse avec le Moût 2010, Vin de France du Domaine Renard des Côtes qui lui aussi ne l’a pas eue, mais l’a-t-il seulement recherchée… sûr qu’en associant Pinot Noir au Gamay d’Auvergne dans la région du même nom, la route paraît encore très longue, aussi bon soit le vin, aussi goupil soit Thierry Renard, son géniteur.
Sur le coup, le vin se goutait un peu comme un débat politique, tantôt avec de très bon moments, tantôt avec des creux, le camp de fruit ou celui de l’austérité en ayant alternativement pour son argent. S’il n’y avait pas, ce soir-là, de quoi faire péter l’audimat, on retiendra, dans les beaux moments, un beau fruit au nez comme en bouche, des tanins bien ronds, des notes sudistes d’eucalyptus, de pruneau cuit, de la fraicheur sous tension et dans les moins bons des notes de foin, de médicament (Quoi ?) et une amertume un peu trop soutenue.
Les militants
On entre ici dans une catégorie ou le vin n’est pas au centre d’une quelconque politique ou un bras armé contre des élus de la nation, mais dont les vignerons concernés ont montré plus que largement leur militantisme pour telle ou telle cause.
Le premier de ces Messieurs est Jean-Pierre Frick. Derrière son apparence première qui rendrait Sarko « émotif anonyme », se cache, en sus du grand vigneron qu’il est, un enragé de la cause écologique qui a fait de la fermeture de la centrale Fessenheim, un des combats de sa vie, un combat pas pour autant gagné quand on voit que l’un des premiers sites industriels visité par le candidat encore non émotif anonyme, c’est celui-là.
Mais aujourd’hui, chez l’ami Frick, ce qui nous préoccupe, ce sont ses vins. De plus en plus connu pour la grande maîtrise de ses crémants que beaucoup de champenois jalousent, Jean-Pierre nous a aussi habitué à une grande lignée de vins minéraux, particulièrement sur les rieslings. Ce Riesling Grand Cru Steinert 2005 ne déroge pas à la règle. Déjà bien mature à la robe, le vin balance au nez entre arômes primaires d’agrumes et secondaires plus hydrocarburés.
La bouche est superbe, très concentrée, tendue par la fraicheur, arrondie par le miel, mais ce sont surtout les notes minérales qui s’imposent non sans s’accompagner de très beaux amers très fins. La finale est longue, pierreuse, tendue plus sur le registre du sec que celui d’une certaine générosité que l’on rencontre souvent sur 2005. Une grande réussite.
Le second de ses Messieurs, on imagine qu’il risque de recueillir pas mal de suffrages dans ces vendredis du vin, tant la personnalité de Jean-François Nicq est clairement attachée au militantisme de gauche, à tel point, si l’on désire parler pinard avec lui, qu’il vaut mieux éviter toute allusion politique avec lui. Que son domaine s’appelle « Les Foulards Rouges » n’étonnera personne, lui qui fut marqué dans sa jeunesse par le roman policier éponyme (F.H. Fajardie) qui a comme cadre la révolte du peuple contre le clergé puis contre les nobles au temps de Mazarin. Nous, on parie qu’il en aura bien des dizaines de quilles référencées pour ces VDS…
Nous, à Bruxelles, on a ouvert La Soif du Mal, Les Vilains et Zéro de Conduite, mais on aurait tout autant pu proposer les géniales cuvées Frida ou Les Glaneuses…
Le Côtes du Roussillon Rouge « La soif du Mal » 2004 nous a amené d’emblée sur les chemins de la syrah, pas ces syrahs surmaturées qu’on rencontre en Roussillon, mais bien plus nordiques, tendues, au point, comme on n’a pas eu le temps de carafer la quille, que l’acidité se montre encore un peu perlante et que surtout, au nez, on est sur cette phase de réduction typique du cépage. Une agitation assez sévère du vin dans le verre corrige largement le tir pour donner un fruit bien plus éclatant. Point positif, les tanins se montrèrent ici particulièrement polis !
Le Côtes du Roussillon Rouge « Les Vilains» 2009 (100% Carignan) est d’emblée bien plus plaisant avec beaucoup de fruits rouges, de la cerise, un nez, en fait très généreux, une larme solaire ajouté d’une impression carbonique. La bouche est ample, tendue avec un bel équilibre entre les fruits et les tanins, à nouveau bien intégrés. Si c’est encore un peu jeune, c’est prometteur et je verrais bien la chose sur une andouillette de chez « Max, coiffeur pour homme ».
Le Pet Nat « Zéro de Conduite», Vin de Table du Roussillon, issu de Muscat à petits grains lui ne la fait pas, hélas. Les bulles annoncées se sont barrées, le sucre idem… il reste un « machin » assez plat, trop plat… dommage !
Les insolites
Dans cette catégorie, on retrouve forcément de tout, le plus souvent sauvé par l’humour qui y est attaché, avec des jeux de mots parfois un peu limites…
Le premier exemple est cette infecte bouteille à ne pas même confier aux rats de nos égouts qu’est la « Cuvée du Président », vin rouge d’Algérie, probablement dernier vestige d’un Président désormais « déchu » qui a le bonheur de nous faire penser à un bien beau printemps, finalement. Mais ce goût de vieux bordeaux pourri, alors, là, BEURK
Ca me rappelle une petite à Alger...
Quoi, le côté Vieille Copine ?
Deuxième exemple de vrai humour, c’est notre Philippe, toujours à la recherche d’une bonne facétie, qui nous sert son jus de treille dans un « Pot de Vin » 100% garanti pot de vin… et il est vrai qu’au pays des Belges, on sait ce que cela veut dire….
Laissons à ce pot, son premier rôle, donc, celui d’ « arroser » nos gosiers… Le hic, c’est que l’Aloxe-Corton 1996 du Domaine Denis qui fais office de liquide contenu souffre de cette dureté trop rencontrée sur les rouges lors de nos dernières dégustations hivernales. Acide, poussiéreux, sanguinolant… bref, un vin de gladiateur…
Plus de fruit mais toujours trop de dureté sur l’amusante et rock’n’roll cuvée « BX for Ever », Vin de France 2010 du Domaine La Sorga, un pet nat d’Anthony Tortul, jeune talent en Roussillon.
Si le vin s’avère loin du sommet de sa forme espérée, on imagine que son généreux donateur du soir a vu dans la contre-étiquette un quelconque message politique… à vous de juger, hein !
Sauf que ceux qui sont en mal d’idées pour les VDvs…. Voilà un thème salon de l’auto qui s’impose…
Il reste à causer de deux cuvées restantes, la première, le Côtes du Rhône Rouge « Mistral » 2010 du Domaine Rouge Bleu beaucoup trop jeune, la seconde, le Côtes du Roussillon « Grand Red » 2008 des Mas Baux tout simplement pas terrible, les deux bien trop « dures » pour la saison, malgré la table bien fournie….
No comment, enfin, si… je vous invite à trouver le lien avec la politique… là, c’esty plus du second mais bien du troisième degré !
Un très chouette final, toute fois avec une cuvée »OFF très Jean-François Basin, soudainement ressuscité de son lendemain de la veille aux parfums de Brigittines (à ne pas confondre avec Bridget, la petite photographe).
Cette cuvée, c’est le Brouilly 2008 de M’sieur Noun Descombes qui a su nous rappeler qu’un vin rouge peut être souple, généreux et fruité, même quand d’autre se plantent pour une lune mal placée ou que sais-je… Ca… c’est BON ! (purée)
That’s all folks pour cette fois-çi, même si 4 hurluberlus ont trouvé le moyen de quelques ders pour la route au bienséant Moeder Lambic, temple bruxellois de la vraie bière… Vous avez dit Cantillon ? Y en avait…
Donc, on pense bien, nous ici, à Bruxelles, que ce nouveau petit délire fera mentir les esprits chagrins qui ont préféré remettre dans l’urne de ces VDVs une feuille blanche plutôt que de gratter un peu un sol qui ne demandait que de nous fournir des parfums électoraux. Avait-on besoin d’un scrutin, pour autant, non certes, au troisième tour, un seul candidat ramasse 100% des voix, c’est l’autoproclamé Président « Antonin Vindicateur » et s’il faut accepter un jour un totalitarisme, pourvu que ce soit le sien, celui des quilles pleines de glou qui coulent à flot…
Gardez en tête ce slogan :
VOTEZ ROUGE OU VOTEZ BLANC MAIS VOTEZ DANS LE GLOU
Là-dessus… Français, Françaises et tous les autres, assimilés ou non par Narine,
« Au Revoir ! »