Les animaux malades du lait cru
Un Loup quelque peu clerc prouva par sa harangue
Qu'il fallait dévouer ce maudit animal,
Ce pelé, ce galeux, d'où venait tout leur mal.
Sa peccadille fut jugée un cas pendable.
Un fromage au lait cru! Quel crime abominable !
Rien que la mort n'était capable
D'expier son forfait : on le lui fit bien voir.
Selon que vous serez puissant ou misérable,
Les jugements de cour vous rendront blanc ou noir.
Depuis quelques jours le patrimoine agricole belge est secoué en son sein le plus profond par une bien triste affaire au centre de laquelle se retrouve un fromage historiquement produit à base de lait cru.
Et quelle tristesse d’entendre au journal télévisé de la RTBF, ce mardi midi, que José Munnix, un des deux producteurs de la région d’Herve persistant à garder vivante la tradition de ce fromage au lait cru, laisse tomber le gant, fin de cette année, las de ne pouvoir lutter contre des pouvoirs publics dont l’intolérance a eu raison de sa passion, son âge aussi ne lui permettant pas d’entamer une résistance que d’autre Emmanuel Giboulot a accepté dans le secteur du vin.
Comment en est-on arrivé là pour un fromage dont pourtant, le mouvement Slow Food avait fait une « Sentinelle », c.-à-d., avait ainsi reconnu son caractère unique et intimement lié à la culture et au patrimoine agricoles de notre pays, une reconnaissance bien plus forte qu’une AOC ou une AOP ?
Tout simplement par hygiénisme.
Plus les décennies passent, plus les nombreux scandales agro-alimentaires ont rendu le politique et les administrations qu’il nomme terrorisés par la plus petite aspérité qui pourrait éloigner un produit alimentaire d’un standard lissé, appliquant chaque jour un peu plus la tolérance zéro, rendant ainsi la vie impossible à une exploitation réellement artisanale et de petite taille.
Que les choses soient claires, pointer ici, dans la fermeture de la ferme Munnix, la seule responsabilité de l’AFSCA (Agence Fédérale (belge) pour la Sécurité de la Chaine Alimentaire) serait bien trop facile, l’agence ne faisant qu’appliquer la loi que le législateur dans sa paranoïa croissante a édictée.
Et le problème est bien là, cette paranoïa ambiante qui fait que là où la loi permet encore à la vente en grande surface un degré de contamination en listeria maximum de 100 unités/gramme, elle ne permet aujourd’hui plus de conserver et vendre un produit à la ferme contenant analytiquement 4 ou 5 unités/gramme sur la même échelle partant du principe prophylactique que rien ne dit que ce qui est dosé à 4 ou à 5 aujourd’hui ne dépassera pas les 100 un jour ou l’autre.
Et comme ni l’AFSCA, ni le producteur ne possèdent une boule de cristal pour infirmer ce doute, on préfère fermer les vannes et irrémédiablement condamner à mort ce type d’artisanat.
Après on aura beau se retrancher derrière le bon sens, faire des enquêtes prouvant que José Munnix n’a jamais empoisonné personne, insister sur le fait qu’il ne vend ses produits qu’à la ferme, dans un univers qui restreint à son minimum l’impact de la chaîne alimentaire, on aura beau dire que si le lait cru et ses dérivés étaient toxiques, on serait tous morts depuis longtemps, ce sera toujours le principe de précaution qui sera gagnant à partir du moment où il engendre une responsabilité politique.
Parce qu’en vérité, le contrôleur de l’AFSCA, vous l’imaginez fouttre en l’air sa vie professionnelle par sympathie pour un patrimoine auquel il ne croit probablement plus depuis longtemps ?
Tout cela est bien triste….
Mais le grand drame, tous les allergologues du monde vous le diront, c'est qu'à force de tout aseptiser autour de nous, nous nous fragilisons, nous devenons petit à petit incapables de lutter nous-mêmes.
Les allergies chez le bébé sont devenues épidémiologiques et la seule arme dont nous disposons aujourd’hui, c’est de traiter ces allergies de plus en plus lourdement, et surtout aseptiser toujours plus au fur et à mesure que notre immunité s’effondre.
A force de vouloir tuer par hygiénisme toute diversité alimentaire, c’est en fait dans des bulles stériles que nous nous condamnons à terminer à long terme, si aujourd’hui, on ne secoue pas une fois pour toutes le cocotier politique de la peur ambiante.
Tout comme l’opinion publique a défendu Emmanuel Giboulot dans le cadre de l’affaire de la flavescence dorée en Bourgogne, nous pouvons par la pression populaire arrêter ce drame ou au moins le freiner, et nous pouvons redonner à José Munnix le courage de lutter pour préserver son activité.
Cela commence ce jeudi 14 mai, à la journée du fromage de Ciney… TOUS ENSEMBLE ?
José Munnix, n'abandonnez pas, vous êtes notre héros !
Signez aussi la pétition : https://lapetition.be/en-ligne/Nous-vous-demandons-de-sauver-la-derniere-exploitation-fermiere-15719.html
Plus d'infos : http://www.televesdre.eu
Voir aussi le documentaire : "Ces fromages qu'on assassine" : http://www.montparnassevod.fr
Ferme Munnix
Rue de Maestricht, 122
4651 Battice
Belgique
TEL : +32 (0) 87 67 40 01
Web : http://fromageriemunnix.skyrock.com/