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12 mai 2013

Stella di Campalto, étoile à Montalcino

 

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Au sud de Montalcino, à un jet de pierre de l’abbaye de Sant’Antimo, joyau d’architecture romane de la région, se situe un domaine attachant, le Podere San Giuseppe de Stella Viola di Campalto, plus connu aujourd’hui sous le nom de sa propriétaire. A l’image de l’abbaye voisine, tout y respire ici la vie, simple et pure et l’harmonie avec la nature. A l’origine de tout cela, une jeune et belle femme que rien ne prédestinait à la vigne.

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Histoire

Il y a quinze ans, personne n’aurait pu prédire que la très jeune Stella di Campalto allait devenir une étoile montante du Brunello. Il est vrai qu’à l’aube de ses vingt ans, la jolie romaine issue de la noblesse de la région, très jeune mère de deux enfants, réside à Milan et n’est pas très attirée par le vin. De nombreuses possibilités s’offrent à elle dont une vie romaine, mais sa tante, personnage assez original de la famille, parvient à la persuader qu’il y a vraiment quelque chose à faire en Toscane avec le vin, des incitants financiers étant distribués à  l’époque par la région pour planter du Sangiovese.

Ce qui fait vibrer sa tante, c’est que  Stella et son mari ont reçu en cadeau de mariage des terres rachetées à l’église non loin de Castelnuovo dell’Abate, lieu de leur mariage. Ce domaine se nommait depuis 1910 San Giuseppe du nom de son précédent propriétaire, Giuseppe Martelli qui avait cependant arrêté ses activités agricoles en 1940. Il fut finalement cédé en 1992 à la famille de Stella.

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C’est donc sur un coup de tête que Stella se retrouve munie d’une subvention obtenue à Sienne pour créer un vignoble sur les 13, 5 hectares de ce domaine, dont 5,5 hectares peuvent être voués à la vigne en DOCG Brunello di Montalcino. Le tout est de faire renaître ses terres à l’abandon. Si l’idée de départ est de tirer des ressources financières de ce domaine en louant son vignoble. Mais malgré cette première idée, l’état de la terre où tout est à refaire et l’état ruineux du corps de maison principal, Stella va littéralement tomber amoureuse de l’endroit, y voyant un endroit idéal, plein de liberté pour y faire grandir ses enfants. Signe de la vie, en quelques mois, la santé précaire de sa fille ainée s’améliore de manière inespérée. Le fait de devenir vigneronne à part entière s’impose désormais à elle.

Nous sommes en 1998. A peine les vignes plantées, Stella opte pour une viticulture bio dont elle obtiendra rapidement l’agrément. Cette idée s’impose à elle d’autant qu’elle a toujours été attirée par la médecine homéopathique et ce qui est en adéquation avec la nature. Sa rencontre avec Nicolas Joly va tout aussi rapidement la motiver de passer en biodynamie, ce qu’elle fera dès 2002, avec l’intérêt supplémentaire que la terre, abandonnée depuis la guerre, n’a jamais connu de pesticides, herbicides ou engrais, elle se prête particulièrement à réagir favorablement à cette forme de phytothérapie.

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Pendant que les vignes, encore trop jeunes pour produire du vin de qualité, grandissent, Stella part à Bordeaux suivre des cours de sommellerie tout en y exerçant de stages bénévoles en sommellerie. De façon originale, son corps apprend le métier pendant que ses vignes se font à la terre. Le coup de tête s’est littéralement transformé en passion.

De retour en Toscane, elle va rencontrer Piero Palmucci du célèbre domaine voisin Poggio di Sotto qui va rapidement devenir son mentor.

C’est en 2001 que sont finalement produites les premières bouteilles, quelques centaines de Rosso di Montalcino. Elle attendra 2004 pour faire son premier Brunello, obsédée qu’elle est par l’idée de bien comprendre sa terre avant d’en tirer sa quintessence. La certification Demeter saluera ses efforts en 2005. Parallèlement à la vigne, Stella veut créer un environnement idéal pour son vin, et partant du fait que rien ne préexiste en termes de réelles installations de production et d’élevage, elle va faire construire un chais en contrebas de sa maison qui est achevé en 2002 et qui, sans rechercher un quelconque tape à l’œil, structuré sur trois niveaux permettra de traiter le vin de la meilleure manière.

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A la vigne, Stella est aidée aujourd’hui par une équipe de 5 personnes dont Gianfranco Noi et par Leonello Aniello comme consultant externe. En plus de ces collaborations, Stella n’est sûrement pas une personne qui s’enferme avec ses certitudes et elle a récemment cofondé SPA, Sangiovese per Amico, une association entre elle, Francesco Leanza du Podere Salicutti, Caroline Pobitzer et Jan Hendrik Erbach de Pian Dell’Orino, association qui a pour but de promouvoir la réflexion commune autour du Sangiovese à Montalcino.

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Un petit groupe où l’amitié prévaut qui fait furieusement penser aux Dolomitici et Elisabetta Foradori. Il est certain qu’on retrouve là énormément de valeurs liées à l’artisanat, au terroir et à la biodiversité que je défends dans ce blog. Une charte appelée « Manifesto  of Diversity » a été récemment publiée pour définir leur collaboration. Stella a aussi rejoint le mouvement Renaissance des Appellations  -Italia.

En quelques années, la jeune fille qui ne connaissait rien au vin est devenue une icône de la viticulture biodynamique  à Montalcino.

Domaine et viticulture

A côté d’une zone de forêt et d’oliviers plantés en 1920, les 5 hectares et demi de vignes s’étendent autour du chai sous forme de 6 parcelles attenantes :

  • La Vigna al Leccio d’exposition Sud-Ouest à 340m d'altitude
  • La Vigna Curva d’exposition Sud-Ouest à 320m d'altitude
  • La Vigna al Sasso orientée plein sud, à 290m d’altitude
  • La Vigna Bassa orientée plein sud, à 270m au-dessus du niveau de la mer
  • La Vigna all'Ulivo orientée à l’ouest, à 280m au-dessus du niveau de la mer
  • La Vigna al Bosco orientée plein sud, à 240m d’altitude.

Les quatre premières parcelles sont vouées uniquement au Brunello, la cinquième est mixte en Brunello et Rosso di Montalcino, alors que la sixième produit des vins en D.O.C. Sant’Antimo.

De pentes douces à moyennes globalement semblables, ces parcelles diffèrent principalement par leurs types de sols, tantôt volcaniques, ferrugineux, calcaires à galets ou argilo-calcaires. Cette diversité de sols se marque de manière très perceptible quant à la manière très différente qu’ont les différentes graminées d’évoluer entre les rangs, ce que ne manquera pas de remarquer un œil avisé.

Si le domaine est divisé ainsi de façon parcellaire, c’est parce que chacune par la nature de ses sols possède son propre caractère d’expression des vins, ce qui explique leur élevage de manière séparée avant assemblage final.

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La densité de plantation est de 4500 pieds à l’hectare avec une volonté de toujours rester entre 30 et 60 hl/ha en y favorisant les sélections massales. La notion de raisins autochtones est ici primordiale. Autour et entre les rangs de vigne, l’accent est mis sur la plantation d’environ 25 types de légumineuses, de graminées, de céréales et de plantes médicinales afin de créer les conditions idéales à l’épanouissement de la biodiversité, tant végétale qu’animale. Tous les traitements  et leurs rythmes sont d’ordres biodynamiques. Les préparations utilisées sont mises en commun avec  quatre autres domaines en biodynamie à Montalcino, dont ceux du groupe SPA. L’écimage des vignes n’est pas pratiqué afin de conserver un toit important (méthode dite de l’accapannamento) nécessaire à l’équilibre des parties foliaires.

Malgré une installation au début de l’histoire du domaine, le système d’irrigation présent est abandonné de par le risque d’apporter trop de soufre à la plante. Parallèlement, l’accent est mis à limiter l’usage du cuivre, actuellement de 700 grammes par hectare et en diminution, l’objectif principal étant bien de laisser la biodiversité assurer la défense des vignes. Les vendanges sont manuelles, en petits plateaux pour respecter les baies au maximum et une sélection rigoureuse leur fait suite.

La cave et l’élevage

L’année 2002 a vu la fin de la construction du chai à trois niveaux où tout est conçu en termes de gravité. Au premier niveau les raisins arrivant de la vendange sont triés et égrappés avant d’être descendus par gravité au second niveau où a lieu le pressurage lent puis la fermentation en futs tronconiques ouverts de 30 hl. La fermentation se fait sous l’action unique de levure indigène sans aucune tentative d’accélération du processus. Durant la fermentation, les lies sont remontées 4 fois par jour à l’aide de pompes péristaltique, le reste du travail étant essentiellement manuel.

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Une fois la fermentation alcoolique terminée, le vin est descendu par gravité au niveau de vieillissement, à 15 mètres de profondeur et à température constante, où il atteindra sa maturité en barriques de 225 litres ou en foudres de 900 litres. Une partie des barriques (+- 20%) est remplacée chaque année par des barriques neuves. L’influence marquante du bois n’est toutefois pas recherchée. D’une manière assez intéressante Stella di Campalto défend l’idée que depuis qu’elle est en biodynamie, l’influence du bois sur le vin a été terriblement diminuée par rapport à l’époque où elle était en simple agriculture biologique.

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Durant tous ces processus, les vins sont toujours séparés par terroirs, ce n’est que peu avant la mise en bouteille qu’ils sont assemblés, de même à tous moments, l’usage du soufre est réduit au minimum. Aucun enzyme ou autre adjuvant technologiques ne sont ajoutés et les vins sont clarifiés par précipitation naturelle et aucune filtration stérile n’est effectuée afin de préserver au maximum l’authenticité des vins avec un respect total de la variété induite par chaque millésime. Aucun assemblage avec un millésime plus ancien n’est donc pratiqué même si la DOCG le permet à raison de 15%.

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Les mises se font au printemps ; Le Rosso est élevé 2 ans en bois et un an en bouteille, alors que le Brunello, majoritaire, est élevé 45 mois en bois suivi d’un an et demi en bouteille. La philosophie des deux vins se veut rigoureusement différente comme ce qui se fait à Fonterenza. Le Rosso a une vocation de vin de fruit, de soif et de pure buvabilité alors que c’est bien la profondeur et la marque des terroirs qui est recherchée dans le Brunello, bien qu’ici aussi, la notion de buvabilité reste un maître mot.

En 2006, la production de Brunello était de 11.000 bouteilles pour 7500 de Rosso. Une IGT de 100 bouteilles avec des cépages allochtones existe encore mais n’est pas dans la volonté du domaine quant à sa pérennité. Parallèlement, le domaine produit un peu de grappa et d’huile d’olive.

 

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Dégustation

Nous avons eu le plaisir de goûter plusieurs vins sur fût ce qui est une entreprise pleine d’intérêt vu que les différents terroirs sont vinifiés séparément. Globalement les 2011 s’annoncent assez difficile, vu le caractère solaire important. A ce jour, difficile de s’exprimer vraiment, à côté d’une matière dense, serrée, assez fermée, l’acidité d’une excellente qualité permet tous les espoirs. Les 2010 sont nettement plus profonds, a côté de futs qui ne renient tantôt par leur solarité, tantôt par leur caractère purement juteux, la barrique qui contient le vin issu du Sasso, se montre tout simplement prodigieuse de profondeur et de salinité. Cette cuvée me fait penser à la minéralité des Morei d’Elisabetta Foradori. Le moins qu’on puisse dire c’est que tous les éléments sont là pour, après un assemblage judicieux, balancer un tout grand vin. Le 2009 a été goûté, assemblé, peu avant la mise, et s’il montre moins de profondeur que le Sasso, on peut parler de grande réussite en termes de jus et de buvabilité, tout en conservant cette notion de classe et de finesse  qu’on ou devraient avoir les Brunellos. En finale, le côté sanguin juteux du Sangiovese domine, pour notre plus grand bonheur.

Les vins sont pour leur immense majorité d’une grande fluidité, pour ne pas dire buvabilité, respectant clairement les objectifs de Stella, aidés en cela par une superbe intégration des tanins, conférant aux vins un aspect satiné irremplaçable.

De retour en Belgique, nous avons goûté les deux vins actuellement commercialisés

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A l’ouverture le Rosso di Montalcino 2009 surprend un peu par rapport aux standards de l’appellation.  Le nez est assez puissant, riche, solaire, assez végétal et surtout, il développe des arômes de chocolat très mourvèdre. La bouche est très gourmande, ronde avec des sucres embarqués qui risquent de ne pas plaire à tous. Mais grâce à une fraicheur conservée, une sensation de véritable équilibre, on se dirige plus vers une image d’Amarone que de vin en surmaturité. Une belle pièce de viande devrait anoblir ce vin, il y a cependant lieu, à mon avis, de le servir à moins de 15°C. Il faut bien noter qu’on ne parle ici ni d’alcool, ni de tanins secs, ces derniers s’avérant à nouveau d’une grande souplesse. Avec l’ouverture, l’aération, cette puissance a, de plus, le mérite de s’assagir atténuant les sensations de rondeur au profit de la buvabilité et de la fraicheur.

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Le nez du Brunello di Montalcino 2007 est nettement différent de son prédécesseur, plus en retenue d’abord, de plus en plus sur le fruit avec l’aération. Des notes boisées sont présentes mais sans excès. Par rapport à une certaine retenue du nez, la bouche explose de fraicheur, de jus mais aussi de structure, avec une profondeur indéniable. Par rapport à d’autres 2007 goûtés précédemment la souplesse est ici de rigueur, la maitrise veloutée des tanins alliée à une acidité presque tranchante étant certainement les maîtres d’œuvre de cette sensation. Le boisé, encore assez présent vu la jeunesse de la bouteille promet lui aussi une future intégration idéale. Personnellement, on tient ici un de mes meilleurs Brunellos de 2007. Clairement, aussi, il faut noter l’énorme différence entre le juteux très généreux du Rosso et la classe en retenue du Brunello, respectant à nouveau cette différence annoncée par la vigneronne. Mais dans les deux cas, la buvabilité interpelle, probablement due à cette incroyable intégration des tanins.

Conclusions

Tout cet article peut en fait se résumer par une citation de Stella que je me suis permis de traduire ci-dessous.

« Je veux que mes vins aient de l’authenticité. J'adore quand chaque vin a sa propre personnalité. Parfois ils sont plus fermés, parfois ils se battent, parfois ils sont détendus. Le vin doit être simple et complexe, simple et profond en même temps. Mon rôle n’est pas directeur, ce sont les vins qui font ce qu'ils veulent. Le vin est un message de la nature, du sol. Il peut changer, comme la musique. Il peut vous rendre heureux ou triste, mais il doit être vrai... Il doit toujours être vrai.".

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Je me réjouis de goûter à ma prochaine visite des millésimes plus anciens, tant je suis intrigué de voir si tous proposent autant de finesse de simplicité et de buvabilité… à la hauteur indéniable du premier contact que j’ai eu au domaine avec sa propriétaire.

Encore une vraie « Bella Personna » à découvrir à travers ses vins.

Coordonnées

Azienda Agricola S. Giuseppe “Stella di Campalto”
S.P. 55 Della Badia di Sant’Antimo, Km 10,2
Castelnuovo dell'Abate 53024, Montalcino (Siena)
Casella postale, 6
Lat 42.98410; Long 11.52781

Tel & Fax: +39 0577 835754
E-mail:
info@stelladicampalto.com
http://www.stelladicampalto.it

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Commentaires
F
Bravo pour ce rapport complet et précis
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